Contre le sexisme des ateliers de vélo communautaires, une tactique féministe s’est mise en place: des soirées non-mixtes où les personnes s’identifiant comme femmes, trans ou queer peuvent évoluer dans un espace qui se veut sécuritaire. Malgré leur popularité, ces soirées reçoivent encore beaucoup de critiques. Les soirées non-mixtes, stigmatisantes ou inclusives? Retour sur une discussion menée par Kelly Schwab lors de vELLE-oh!
De la nécessité des espaces non-mixtes…
Dès le début de la discussion, une évidence émerge: on décèle plusieurs formes de sexisme dans les ateliers communautaires. Que ce soit à cause du sexisme visible (prendre les outils des mains d’une femme, faire moins confiance à une femme mécano) ou plus subtil qui fait que les femmes n’oseront pas aller dans un atelier parce que « ce n’est pas pour elles», beaucoup de travail est à effectuer pour que les femmes soient réellement les bienvenues. Dans ce contexte, les espaces non-mixtes deviennent une solution immédiate à un problème systémique. En éliminant une des sources de sexisme – les hommes – et en explicitant le désir de n’exclure personne, l’ambiance change immédiatement.
L’effet bénéfique s’étend au-delà des murs des ateliers. Pour certaines, la simple existence des soirées non-mixtes leur permet de se voir elles aussi mécaniciennes. Après ça, pas besoin d’y aller: l’espace leur appartient déjà.
… et de la nécessité de les dépasser
Pour plusieurs, les espaces non-mixtes sont un tremplin servant à acquérir des connaissances et de la confiance en soi pour ensuite (ré)intégrer les espaces mixtes. La non-mixité ne devrait pas être un but en soi, mais plutôt un moyen de soulever des questions importantes à l’échelle de l’ensemble de l’atelier qui permettraient de rendre les soirées non-mixtes désuètes.
Il convient aussi de prendre en compte les dangers de la non-mixité. Par exemple, la perception que les femmes sont assez bonnes pour s’aider entre elles, mais pas assez pour aider des hommes. Ou bien que toutes les femmes sont des débutantes pour qui il ne vaut pas la peine d’organiser des ateliers de mécanique de plus haut niveau. Pour éviter de renforcer les stéréotypes, pourquoi pas organiser des initiations à la mécanique de plus haut niveau?
Au terme de la discussion, un constat s’impose: les espaces non-mixtes sont une solution imparfaite dans un monde imparfait. Ce n’est pas pour autant une raison pour les abandonner.
Car comme le dit si bien une des participantes à l’atelier: « si ces espaces peuvent faire qu’on peut vivre en paix un peu plus, je suis d’accord. »